Brave homme ou homme brave ?
Lorsque je présente la communication bienveillante, j’aime bien expliquer qu’elle cultive une attitude qui soit ni hérisson, ni paillasson. Elle cherche à ouvrir un dialogue sans sortir les pics à la moindre contrariété, sans non plus s’écraser immédiatement. Cet entre-deux n’est pas simple à trouver, mais il permet de porter un regard bienveillant aussi bien sur ses propres attentes que sur celles de son interlocuteur.
Mais cette présentation appelle plusieurs précisions. Il peut arriver qu’il soit juste de ne pas répondre. Et je pense à l’attitude de Jésus dessinant sur le sable alors qu’on lui demande de se prononcer sur le sort de la femme adultère. Il est aussi parfois pertinent d’affirmer haut et fort un refus, dans les situations d’injustice ou qui mettent en cause des valeurs essentielles. Le refus de Jésus que la logique marchande pénètre le Temple illustre cette attitude. Il y a des situations où il ne faut pas tolérer l’intolérable et au moins les faire connaître au grand jour.
Selon les tempéraments, nous cultivons plutôt le côté brave homme, qui aurait tendance à s’effacer ou le côté homme brave qui marque son opposition. Cela influence aussi notre façon de voir Jésus. Nous aurions tendance qu’à ne retenir qu’un aspect de sa personnalité.
Dans cette période d’après Pâques, il me semble que nous pouvons sentir la force de cette vie en abondance que Dieu nous donne. Et s’il fallait choisir pour cette période d’après résurrection, j’inviterai volontiers à réveiller l’homme (ou la femme) brave qui sommeille en nous. Le tombeau est vide. Mais l’esprit souffle partout. En marche les humiliés du souffle !
Dans cette optique, j’aimerais présenter une interprétation “version homme brave” du passage sur tendre l’autre joue. En montrant l’autre face du visage, il s’agit de présenter un autre aspect de la réalité. Se lever, et présenter une approche différente d’un conflit, dénoncer les manipulations et l’injustice requiert une certaine force.
Les mots peuvent permettre de renverser les tables d’une logique qui ne connait que le marchandage ou les petits arrangements entre privilégiés. Ils peuvent aussi aider l’interlocuteur menaçant à prendre conscience de la violence que porte son attitude. La vigueur et la fermeté peuvent alors sortir de sa logique la personne au comportement agressif, l’éveiller à une autre approche, le sortir de son mauvais rêve.
PS : comme toujours, il ne s’agit pas non plus d’envoyer les personnes à l’abattoir, à chacun d’être bienveillant avec soi-même. Parmi les nombreux besoins humains, il y a aussi ceux de sécurité matérielle, affective, de protection qui doivent être nourris également. Pour tendre l’autre joue, il faut d’abord avoir écouter ses aspirations, être suffisamment nourris de tendresse pour oser présenter un autre visage. En cette période d’après résurrection, ce peut être aussi un beau programme de se laisser toucher par la douceur de Dieu. L’homme (ou la femme) brave est aussi celui ou celle qui s’ouvre à cette délicatesse là.
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